Tout chez John Kennedy Toole, cet écrivain américain de génie, est dramatique, presque absurde : sa vie, sa mort, son succès. Avant tout, J K Toole est connu pour être l’auteur du best-seller posthume célèbre entre tous : « La Conjuration des imbéciles ».
Si vous le souhaitez, sur mon blog, j’ai écrit un article sur cet ouvrage qui remporta, en 1981, après la mort de John (oui, je l’appelle John car j’estime, même mort, qu’il a besoin de notre tendresse et de toute notre affection), le prix Pulitzer. Hé ! Le prix Pulitzer, quand même !
Le 26 mars 1969, alors qu’il n’avait que 31 ans, John Kennedy Toole décida de mettre fin à ses jours : autant vous dire qu’il y parvint aisément (voiture, gaz d’échappement, tuyau dans l’habitacle, asphyxie, mort = la collaboration parfaite pour en finir). Tout ça est dramatique.
Le reste en serait absurde s’il ne s’était agi du décès d’un génie précoce qui en avait encore sous la semelle… heu, je veux dire, sous la plume ! Ce que j’entends par là, c’est que ce livre, cet ouvrage, tendre, mélancolique, poétique, « La bible de néon » a été écrit par un Toole enfant (oui, je l’appelle aussi Toole, parfois). Il était peut-être âgé de 15 ou de 16 ans. Vous rappelez-vous comment vous écriviez, vous, à cet âge-là ? Personnellement, je me le rappelle parfaitement, et je peux vous assurer que mes écrits étaient proche de la nullité.
Mais, ici, dans « La bible de néon », il n’est nullement question de cela : non, cet excellent roman est, au contraire de « La conjuration » (oui, il m’arrive aussi…), vision satirique et truculente du monde moderne, cet excellent second roman est la peinture pleine de sensibilité d’un petit monde en proie à la bigoterie la plus suffocante, évoqué avec une vérité remarquable par un auteur tellement jeune.
Contrairement aussi à son premier opus, « La bible de néon » est un livre court (234 pages en pavillon poche), très peu onéreux (moins de dix euros), et si doux, si… pfft… indispensable, que je vous suggère de mettre à profit cette période estivale pour le lire d’une seule traite.
Vous savez, quand je disais que l’existence du petit John (oui, il m’arrive…) fut aussi absurde que dramatique, je n’exagère pas. Huit éditeurs refusèrent de publier « La conjuration des imbéciles » (bravo, les gars !). À sa mort, ses biens furent évalués à huit mille dollars, et à deux tapuscrits (qui deviendraient, plus tard, ses deux romans).
Sa mère, chère Thelma dévouée corps et âme à son fils (qu’elle eut à 37 ans alors que les médecins lui avaient affirmé qu’elle ne pourrait jamais avoir d’enfant = encore toutes mes félicitations, les gars !), cette chère Thelma, parce qu’elle adorait ce fils qu’elle pleura durant dix-huit ans, insista, insista, et insista encore pour que son fils fût publié. Elle avait raison, non ?
J’emploie, de manière inhabituelle, un ton caustique car il me semble que la vie de J K Toole fut un immense malentendu avec le destin. Quel auteur talentueux ! Pardon de le rappeler, mais il a écrit « La bible de néon » à 15 ans ! Ce n’est pas rien, quand même !
Alors, si vous voulez découvrir ce petit John qui en bavé des ronds de chapeaux, je vous conseille la lecture de cette bible qui clignotera longtemps dans votre cœur. Éditions Robert Laffont. Première édition française en 1991.