Dans Mes lectures indispensables, je classe « Journal d’un corps » de Daniel Pennac, paru en 2012 chez Gallimard, en excellente position. Je connaissais cet auteur par ouï dire, mais je n’avais jamais rien lu provenant de sa plume. Comme souvent, on connaît cet écrivain parce qu’on en a entendu parler, parce qu’il a remporté un prix littéraire prestigieux. En l’occurrence, le prix Renaudot, en 2007, pour son roman autobiographique « Chagrin d’école ».
J’ai eu la chance de découvrir « Journal d’un corps » à une période de ma vie où tout allait pour le mieux : j’étais amoureux – et c’était réciproque… c’est mieux, hein ? –, je gagnais bien ma vie et je faisais un boulot qui me passionnait. Autant vous dire que ce livre a été, pour moi, d’une lecture jubilatoire comme rarement ce fut le cas avec d’autres romans ! Pensez donc : le narrateur a tenu un journal intime, de 13 à 87 ans, sur son corps et ses transformations successives tout au long des aléas d’une existence bien remplie !
Le point de vue, pardon, le point d’écriture que Daniel Pennac adopte pour raconter le temps qui passe est d’une profondeur infinie. Avec le corps – le sien, le vôtre, le mien – comme sujet central, simple et complexe à la fois !
Pour moi qui ai passé la cinquantaine et qui, lors de sa première lecture, n’en étais pas encore là, je me suis retrouvé à maintes reprises dans les mots de l’auteur. C’est bien là où se trouve la force de « Journal d’un corps » : donner à penser à chaque lecteur que c’est aussi un peu son propre journal intime.
En outre, comme tout journal intime – en vrai, si je puis m’exprimer ainsi –, le récit est découpé en paragraphes plus ou moins courts, qui eux-mêmes font partie intégrante de chapitres assimilés à des périodes précises de la vie : « 12-14 ans », « 15-19 ans », « 21-36 ans », etc., jusqu’aux 87 ans et 19 jours du narrateur, c’est-à-dire jusqu’à sa mort. Durant ma lecture, et notamment lors de la période « 15-19 ans », j’ai vraiment cru que Daniel Pennac parlait de véritables faits, tant ceux-là étaient empreints d’une clairvoyance, d’une sagacité dans leur évocation plus que troublantes ! Il est incontestable que, en tant que garçon, j’ai moi aussi rencontré les mêmes questionnements sur le corps de la femme. Franchement, le passage, quand le narrateur est âgé de 16 ans, 6 mois, 15 jours, le jeudi 25 avril 1940, est un pur délice… que je vous laisse découvrir si ce n’est déjà fait !
Selon moi, « Journal d’un corps » est un livre important, troublant, et que je relirai sans doute encore, et encore, et encore… En outre, paraît-il qu’il a été réédité, en 2013, dans une version illustrée. Il a été mis en dessin par Manu Larcenet, et cette bande dessinée, me chuchote-t-on dans mon oreillette, est toujours disponible à la vente. Aujourd’hui. En juin 2020.
« Journal d’un corps » de Daniel Pennac, aux Éditions Gallimard.